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Interview / Tiken Jah Fakoly à cœur ouvert : « Je n’ai pas le droit de supporter une équipe pendant la CAN » (1ère partie)

SamCamus TikenJah

La superstar mondiale du reggae, Tiken Jah Fakoly est de retour au bercail après une tournée triomphale en Europe. Nous lui avons arraché quelques mots, notamment sur l'actualité brûlante.


La Côte d’Ivoire organise dans quelques jours, la 34e édition de la CAN. Quelle émotion vous anime à l’idée d’accueillir ce beau monde chez vous ?

Je suis très heureux que la Côte d’Ivoire organise cette compétition dans cette période de stabilité, ou notre pays commence à se relever. Parce qu’il faut savoir qu’on vient de loin, après tout ce que nous avons connu. C’est toute l’Afrique qui va se retrouver ici, alors je suis très heureux. J’espère que la Côte d’Ivoire va avoir les retombées.

Un morceau à la gloire des Éléphants, un programme chargé d’activité pendant cette période, comment préparez-vous cette CAN ?

Je n’ai pas de morceau en vue. Je me considère comme un Africain d’origine ivoirienne. Je n’ai même pas le droit de jubiler pour une équipe. Je n’ai pas le droit de supporter une équipe. Je dois garder ça dans mon cœur, même si tout le monde sait ou je veux que la coupe reste. Pendant la CAN, je donnerais des concerts au Stade Félix Houphouët-Boigny, le 28 janvier 2024, on verra la suite.

Après les deux concerts que vous avez donnés dans le cadre d’Africa Reggae Festival, que retenez-vous ?

C’est la première édition de ce festival. Un enfant nait, il grandit et devient ce qu’on souhaite. L’objectif était d’implanter ce festival dans le cœur des mélomanes, pour qu’on sache désormais qu’en Côte d’Ivoire, il y a Africa Reggae Festival, dans le but de consolider notre place de deuxième capitale du reggae dans le monde. Si ça marche, l’ambition est de faire venir des tourneurs, éditeurs ici pour qu’ils viennent découvrir nos frères qui sont ici, et qui ont beaucoup de talent. Parce que ce n’est pas normal que ce soit Alpha Blondy et moi qui tournions sur le plan international.

Après le concert manqué d’Abobo, Tiken Jah remonte sur scène à Abidjan, comment avez-vous jugé le retour et le feeling de vos fans ?

On voulait le Palais de la culture pour notre concert, mais c’était trop cher pour le reggae. Les gens estiment que cette musique ne devrait pas être vendue à 50.000 Fcfa l’entrée. Les autres musiques, peuvent faire 100.000 f, 250.000 f, mais le reggae qui est la musique du ghetto, la musique des sans voix, ce n’était pas possible. Nous commençons un nouveau festival. Et comme les autres, des difficultés surviennent dès les débuts, et puis ça décolle après. Pour moi donc, le retour des mélomanes était positif.

Quel regard portez-vous sur le niveau du reggae en Côte d’Ivoire ?

Nous avons un bon niveau. J’écoute souvent les jeunes, ils sont très talentueux, et je me dis, ‘’ce n’est pas normal qu’il soit là’’. C’est l’originalité qui manque à ces jeunes. Chacun doit être original à sa façon. Je dis aux artistes reggae, de mettre les sonorités de leur terroir dans leurs créations. Il ne faut pas chanter comme Alpha Blondy ou s’habiller comme Tiken Jah. C’est mon message à la jeune génération.

« Il ne faut pas s’attendre à une retraite de Tiken Jah »

Peut-on dire que le reggae est victime de son caractère engagé ?

Oui, le reggae est victime de son caractère engagé. Depuis Bob Marley, le reggae a toujours rimé avec la politique. Il a toujours pris position, c’est un contre-pouvoir. C’est la raison pour laquelle Bob s’est fait tirer dessus, d’ailleurs. Nous devons tout faire pour ne pas dénaturer ou mettre du cube Maggi dans le reggae. Il faut tout faire pour maintenir la barre. Ceux qui sont dans l’opposition, doivent se retrouver dans nos chansons. Nous devons faire notre devoir. Nous sommes la branche musicale de la société civile, nous ne devons pas perdre cela de vue.

Près de 30 ans de carrière, une douzaine d’album, des tubes qui traversent le temps… Pensez-vous avoir accomplir votre devoir ?

Je pense avoir fait ce qu’il fallait. Je suis un humain, j’ai certainement fait des erreurs, mais j’ai fait choses positives aussi. Le chemin est encore long, l’objectif est de réveiller l’Afrique. De dire aux Africains que personne ne viendra changer notre situation à notre place. Il faut qu’on se lève pour réclamer nos droits. L’Afrique est dans un processus de réveil, de démocratisation et de développement. L’Afrique a encore besoin de cette musique qu’est le reggae. L’objectif n’est pas encore atteint, et il ne faut pas s’attendre à une retraite de Tiken Jah pour le moment.

Entre les premières chansons et les plus récentes, pensez-vous que votre musique a toujours le même impact sur les mélomanes ?

La musique de Tiken Jah a toujours de l’impact sur les mélomanes, je pense. Quand je circule dans les rues, je suis salué comme une personnalité. Pour un enfant du ghetto qui a commencé à Odienné, sans télé ni radio, les gens me disent beaucoup de bonnes choses, beaucoup de compliments. Tout le monde ne peut pas être d’accord avec moi, on ne peut pas faire l’unanimité, mais je pense que la majorité des mélomanes apprécie ce que je fais…

Réalisée par Noah Djédjé

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