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Editorial / Niger : la carotte ou le bâton de la Cedeao…

CEMAG cedeao

Sales temps pour les putschistes du côté de Niamey. L’étau se resserre sur les hommes du général de brigade Tchiani qui ont pris en otage le président de la république du Niger. Après avoir refusé de recevoir l’émissaire du président des Etats-Unis, et de céder devant l’ultimatum lancé par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao), les mutins font du dilatoire en « nommant un premier ministre » et en accusant la France de violer l’espace aérien du Niger et de « libérer des djihadistes ». Pendant ce temps, les guides religieux et autres chefs traditionnels annoncés pour les ramener à la raison sont aux abonnés absents. Quant aux chefs d’Etats ouest-africains, ils demeurent inflexibles sur la voie de sortie de crise : ce sera la carotte ou le bâton.

Les putschistes refusent de céder le pouvoir

La sous-secrétaire d’Etat américaine, Victoria Nuland, n’a pas eu plus de chance que l’ancien président Nigérian et le Sultan de Sokoto. Les appels à la raison de l’Union européenne, des Etats-Unis, de la Russie et autres initiatives secrètes, dont celle d’Elon Musk qui a pu s’entretenir aujourd’hui avec le président Bazoum depuis son lieu de captivité, sont restés lettres mortes.

Toutefois, le goût du pouvoir devient de plus en plus amer pour nos soldats qui découvrent que s’asseoir au palais ne se limite pas à profiter des avantages matériels, mais à régler des problèmes cruciaux : payer les salaires des fonctionnaires, approvisionner les hôpitaux en médicaments, entretenir les routes, assurer la sécurité, et surtout combattre le terrorisme, les djihadistes étant à la porte de Niamey ! Car, la réalité du Niger est tout sauf ce que les rêveurs veulent qu’elle soit.

Il ne s’agit pas d’être président…

Le Niger est l’un des pays les plus pauvres de la planète. Son économie repose sur l’agriculture, et non sur l’uranium. Les principales activités de ravitaillement du Niger passent par le port de Cotonou, via le corridor Cotonou-Niamey, long de 1060 kilomètres. Or le Bénin ayant fermé ses frontières dès la clôture du Sommet extraordinaire des chefs d’Etats à Abuja, en application des résolutions prises, de nombreux camions sont bloqués à la frontière, un endroit qui voyait passer au moins 1000 véhicules chaque jour. Produits alimentaires, pharmaceutiques, carburant, etc., plus rien n’entre au Niger. Pire, pour pouvoir boucler son budget, le Niger dépend de l’aide de l’Union européenne, de la France, et des institutions financières internationales, notamment celles de Bretton Woods. Et cela, nos hommes en kaki ne le savaient pas !

Du côté des soutiens, plus rien ne va, non plus. Les djihadistes ont encore fait couler le sang, hier, au Burkina Faso. Au Mali, le célèbre chanteur Salif Kéita a rendu sa démission du gouvernement de transition au moment où les militaires tiraient sur la population de Badiangara qui manifestait pour exiger que le pouvoir les protège des djihadistes.

Pour toutes ces raisons, il faut arrêter la saignée au Niger. Et voilà pourquoi les chefs d’Etats africains laissent le choix aux militaires. Ce sera la carotte ou le bâton.

Des milliers de soldats, des centaines de chars et des dizaines d’avions prêts à frapper

La carotte, c’est la réinstallation du président de la république dans ses fonctions, et le retour en caserne. Et cela, dans les plus brefs délais.
Le bâton, c’est manger la carotte par la force. Pour cela, les chefs d’états-majors des forces armées de la sous-région savent comment leur faire avaler la couleuvre. Inutile de dire que les bases militaires françaises et américaines déjà sur le terrain avec des milliers de soldats leur faciliteront le travail. Sans oublier les Nigériens, militaires ou civils, qui ne partagent pas le point de vue des putschistes, et qui attendent le bon moment pour sortir dans la rue.

Le dispositif utilisera aussi bien la terre, les airs que la mer. Son financement est bouclé. Oubliée la triste époque de l’ECOMOG, où les soldats Nigérians se sont illustrés de la plus mauvaise manière par leur brutalité. Aujourd’hui, nos armées sont professionnelles.

Le secret défense est bien gardé, mais en attendant les instructions des présidents qui se réunissent ce jeudi 10 août 2023, de petites fuites nous apprennent que des milliers de soldats Nigérians, dont des éléments des Forces spéciales, auront le lead sur l’opération militaire. En termes d’effectifs, le Nigéria vient avant la Côte d’Ivoire, le Sénégal et le Bénin. Quant aux moyens qui seront utilisés, pas besoin d’être sorcier pour savoir que Tchiani qui ne peut même pas affronter les djihadistes sera au contact avec un feu qu’il n’a jamais vu.

Un mauvais arrangement vaut mieux qu’un bon procès

Bien entendu, même si les soldats de la Cedeao savent exactement où est retenu le président Bazoum et sa famille, comme ils savent dans quel camp militaire Tchiani et son CNSP sont retranchés, aucune opération militaire ne peut se faire sans effets collatéraux. La porte de la négociation n’a jamais été fermée. Jusqu’à présent, aucune goutte de sang n’a été versée. Fasse Dieu que la sagesse visite Tchiani et ses hommes.

Seydou Koné

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