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Bouaké: Des universitaires réfléchissent aux facteurs du suicide

Université Alassane Ouattara 

La recrudescence du suicide inquiète les populations et le monde universitaire en Côte d'Ivoire. Il ne se passe pas de mois sans qu'on entende parler de suicide ou de tentative de suicides dans le monde en Afrique et particulièrement en Côte d'Ivoire. Le 9 juillet 2024, un gendarme s'est donné la mort en se jetant du Pont Général De Gaulle au Plateau. Ce mercredi 10 juillet 2024, un étudiant s'est jeté de l'immeuble d'une cité universitaire à Port-Bouët toujours à Abidjan. Pour penser scientifiquement la question, l'université Alassane Ouattara de Bouaké a organisé une conférence publique ce mercredi 10 juillet 2024 sur ''La problématique du suicide en Côte d'Ivoire : Quel regard universitaire ?''. Trois personnalités ont entretenu les étudiants et la communauté universitaire et divers autres acteurs sur le thème. Il s'agit respectivement de Docteur Jean Vincent Koua, anthropologue de la santé, du professeur Ousmane Zina, professeur agrégé de Science politique à l'Université Alassane Ouattara et du Docteur François Djo Bi Djo, Expert psychiatre.
Les spécialistes se sont accordés sur la définition du suicide, son ampleur, ses facteurs explicatifs et les tentatives de solutions pour endiguer ce problème de santé publique. Professeur Ousmane Zina a insisté sur l'historicité du suicide depuis l'antiquité à nos jours en passant par le moyen-âge et la période moderne. Comme ses paires panelistes, Ousmane Zina définit le suicide sous le sceau de la définition du père de la sociologie française, le philosophe et sociologue Émile Durkheim comme l'a fait avant lui Docteur Jean Vincent Koua. <<On appelle suicide tout cas de mort qui résulte directement ou indirectement d’un acte positif ou négatif, accompli par la victime elle-même, et qu’elle savait devoir produire ce résultat. La tentative, c’est l’acte ainsi défini, mais arrêté avant que la mort en soit résultée» , a-t-il cité le sociologue français. À en croire les panélistes, la Côte d'Ivoire au vu des chiffres de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), se situe à la 3ème position des suicides en Afrique, et à la 26ème place au monde. Comme Émile Durkheim, les panélistes déterminent trois catégories de suicide à savoir le suicide anomique, le suicide égoïste et le suicide altruiste.
''Les hommes mettent plus vite fin à leur vie que les femmes'', a rappelé Jean Vincent Koua. Pour lui, les facteurs des suicides sont les problèmes de famille, le rôle des médias qui présentent le suicide comme une bonne chose, la situation matrimoniale, la stigmatisation. Jean Vincent Koua estime aussi que les différentes crises successives vécues depuis 1990 en Côte d'Ivoire sont un facteur favorisant des suicides. Le politiste, Professeur Ousmane Zina, maître de conférence agrégé de l'université Alassane Ouattara, explique qu'en Afrique, l'on enregistre 11 suicides sur 100 mille personnes. Pour Ousmane Zina, le phénomène du suicide gagne notre société. Il faut donc sortir des clichés, de la stigmatisation, des accusations gratuites pour une approche clinique de cette problématique.
À la suite de Emile Durkheim, Ousmane Zina distingue le suicide dû à des hallucinations, du suicide mélancolique, du suicide anxieux et du suicide impulsif. << Tout vient de la radicalisation politique, économique, du champ social, des frustrations sentimentales et scolaires. Dans le contexte africain, le suicide vient du rejet de la sacralisation de la vie, du conflit entre la société de l'être et la société du paraître. La société du paraître est une société de forte consommation. Il faut donc travailler sur les inégalités, repositionner la famille. En Afrique le groupe a existé avant l'individu. La collectivité a donné naissance à l'individu. Durkheim est parti de l'individu. En Afrique, il faut partir du groupe>>, argumente Ousmane Zina.
François Djo Bi Djo, Expert psychiatre, indique que le suicide n'est pas qu'une affaire de race, c'est-à-dire ce n'est pas une affaire de blanc, mais tout le monde est visé. Il a relevé qu'en plus du suicide, il existe les tentatives de suicide et les idéations suicidaires. Selon lui, plus de 700.000 personnes se donnent la mort chaque année dans le monde. C'est la 4ème cause de mortalité dans le monde. 77%de cas de suicides sont dans les pays à revenu faible et intermédiaire. En Côte d'Ivoire, il y a 32 décès sur 100.000 hommes. Nous avons 23 cas de suicides pour 100.000 habitants. Il y a 339 cas de suicides sur 863 cas de tentatives de suicides de 2019 à 2024. François Djo Bi Djo retient 3 facteurs explicatifs des suicides.


Alla Kouamé

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