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Au Nigeria, la conversion des voitures au gaz naturel fait son chemin

Adebola Omotosho, mécanicien, doit parcourir huit kilomètres à travers la mégapole de Lagos, capitale économique du Nigeria, pour se réapprovisionner en gaz naturel comprimé (GNC).
Il fait partie des pionniers, dans le pays le plus peuplé d'Afrique, qui ont adopté ce carburant alternatif promu par les autorités mais encore difficile à trouver.
Les avantages financiers et environnementaux compensent, selon lui, le désagrément du trajet.
"Avant, je dépensais 75.000 nairas (environ 44 dollars) pour l'essence, contre 12.000 nairas (environ 7 dollars) maintenant pour le GNC chaque semaine", explique-t-il à l'AFP.
Les autorités nigérianes considèrent le GNC comme la solution miracle pour mettre fin aux pénuries chroniques de carburant et à la multiplication par cinq des prix de l'essence depuis que le président Bola Ahmed Tinubu a supprimé les subventions sur les carburants en mai 2023.
En septembre 2023, Tinubu a créé l'Initiative présidentielle pour le gaz naturel comprimé (PCNGI) afin d'encourager la transition vers une énergie plus propre.
Environ 100.000 voitures ont été converties jusqu'à présent, et plus de 200 millions de dollars ont investis, selon le directeur du PCNGI, Michael Oluwagbemi, et le gouvernement vise la conversion d'un million de véhicules de transport en commun d'ici à 2026.

Coût de conversion

Le Nigeria compte environ 12 millions de véhicules sur ses routes et souhaite rejoindre des pays comme l'Argentine, le Brésil et l'Iran, où des millions de moyens de transport fonctionnent au GNC.
Mais le coût de la conversion est élevé: environ 1,3 million de nairas (732 euros) pour une voiture à moteur quatre cylindres 2,4 litres.
Avec quelque 129 millions de Nigérians vivant dans la pauvreté, selon la Banque mondiale, et un coût de la vie qui explose, peu d'automobilistes peuvent se permettre une telle dépense, d'autant que le pays traverse actuellement sa pire crise économique depuis une trentaine d'années.
"Le coût initial de cette conversion est prohibitif pour la plupart des conducteurs", estime Chidalu Onyenso, PDG d'Earthbond, une société qui aide les entreprises à passer des combustibles fossiles à des énergies plus propres.
Toutefois, M. Oluwagbemi précise que les travailleurs salariés peuvent obtenir des prêts pour convertir leurs véhicules, avec un plan de remboursement sur 12 mois.
Pour atteindre son ambitieux objectif, le gouvernement doit aussi tenir compte de la lenteur des conversions et du nombre limité de stations de réapprovisionnement.
Jide Fasetire, un technicien qualifié, explique à l'AFP depuis son atelier de Lagos avoir converti 20 véhicules depuis que le gouvernement a lancé sa campagne, et en compte 18 sur sa liste d'attente.
Une conversion lui prend au moins deux jours. "Notre objectif est de trois heures, mais nous n'y sommes pas encore", explique-t-il, ajoutant que les techniciens sont en cours de formation.

Scepticisme

L'explosion en octobre d'une voiture fonctionnant au GNC dans l'État d'Edo, dans le sud du pays, a alimenté les inquiétudes du public et provoqué une série de publications sur les réseaux sociaux qualifiant le GNC de "bombe à retardement".
Les autorités ont imputé l'explosion à l'utilisation de "bouteilles de GNC non certifiées et mal fabriquées" et ont promis des mesures de conformité plus strictes.
"Les problèmes de sécurité liés à la prolifération des centres de conversion non agréés posent un grave risque pour la sécurité", explique à l'AFP Kelvin Emmanuel, expert et consultant en énergie.
Babatunde Odukoya, un transitaire qui dépense 150.000 nairas par semaine (environ 88 dollars) pour ravitailler son SUV de taille moyenne, a déclaré à l'AFP que l'explosion d'Edo avait été "décourageante".
L'annonce du gouvernement malaisien d'arrêter d'ici à juillet 2025 pour des raisons de sécurité les véhicules au GNC, qu'il avait introduits dès la fin des années 1990, a aussi nourri le scepticisme nigérian.
Pour Mme Onyenso d'Earthbond, l'adoption massive du GNC permettra de réduire les émissions de gaz à effet de serre, d'améliorer la qualité de l'air et de diminuer les coûts de maintenance.
Toutefois, elle estime que l'adoption du GNC n'est qu'une étape vers "l'écologisation du réseau" de transports dans le pays et que d'autres solutions doivent également être envisagées, comme les véhicules électriques encore moins polluants.

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