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Médias / Le Washington Post se détache d'Amazon pour conquérir de nouveaux lecteurs

Jeff Bezos s’est offert, en 2013, le Washington Post pour 250 millions de dollars. Les membres d’Amazon Prime ont profité de ce rachat en bénéficiant d’un abonnement presse à prix réduit. Le média américain revient désormais sur cette promotion exclusive.
Depuis 2015, les abonnés Amazon Prime souhaitant lire l’édition numérique du Washington Post bénéficient d’un accès gratuit pendant six mois, avant de devoir souscrire à un abonnement mensuel à 3,99 dollars (environ 4 euros). C’est nettement moins que le reste des internautes qui doivent débourser 9,99 dollars (environ 10 euros) par mois.

Cette époque semble révolue. Les membres Amazon Prime verront dorénavant leur abonnement mensuel passer à 7,99 dollars (environ 8 dollars), d'après Nieman Lab. Cette augmentation sera effective dès la prochaine date de renouvellement de leur forfait. Elle intervient alors que le Washington Post est en perte de vitesse, après des années de rentabilité.
Le quotidien américain compterait moins de trois millions d'abonnés numériques, selon le New York Times. Son rival totalise, lui, 8,8 millions d'abonnés, dont plus de 90% en ligne. A l'image de l'ensemble du secteur de la presse, le Post est également confronté à une érosion de ses revenus publicitaires alors que les lecteurs se tournent de plus en plus vers des contenus gratuits sur Internet. Ils seraient tombés à 70 millions de dollars au cours du premier semestre de l’année, soit près de 15% de moins qu'au premier semestre 2021.

Pour conquérir de nouveaux lecteurs, le Post a lancé, en juin, un abonnement numérique innovant. Son prix : 50 dollars (environ 51 euros) par an. Jusqu’ici, rien de bien original. Le quotidien américain a toutefois annoncé que ce montant restera inchangé… jusqu’en 2072. "Cette offre spéciale célèbre la longévité du Washington Post et se projette loin dans l'avenir", a déclaré Mike Ribero, responsable des abonnements, dans un communiqué cité par le Nieman Lab. "C'est une offre qui n'arrive qu'une fois par demi-siècle".

Innover face au "churn"

Cette nouvelle formule a pour but d’élargir les audiences numériques du Post, tout en évitant que ces nouveaux lecteurs ne résilient rapidement leur abonnement. Un phénomène connu dans le monde anglophone comme le "churn" ("taux d’attrition" en français). Il concerne aujourd’hui une large partie de la presse internationale, comme l’a montré une étude réalisée en 2021 par la société de conseil en médias Mather Economics.

On y lit que le taux de résiliation hebdomadaire des journaux s’élève à 0,70%, et 0,85% pour les abonnements numériques. En d’autres termes, si un média compte 10.000 abonnés, il peut s’attendre à ce que 85 d'entre eux annulent leur abonnement chaque semaine. Cela représente 4420 résiliations sur une année, soit près de la moitié de sa base d'abonnés.

Fidéliser les lecteurs, voilà la grande priorité du Washington Post— et de Jeff Bezos. Le milliardaire est clairement engagé dans la stratégie du journal, comme l’avait expliqué Steve Hills, alors PDG de la publication. "Il nous demande d'accorder plus d'attention à nos lecteurs qu'à nos concurrents et d'oublier ceux qui privilégient les profits à court terme. Quel journaliste n'en rêverait pas ?", avait-il déclaré aux Échos en 2015.

Sept ans plus tard, le Post ne semble plus s’appuyer sur l'énorme masse d'abonnés Amazon Prime pour conquérir de nouveaux lecteurs. Reste à savoir si cette stratégie se montrera payante à long terme.


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