Donald Trump : une immaturité flagrante sur le plan militaire (Douglas Mountain)
En tant que première puissance économique et militaire, les Etats Unis ont un droit de regard sur la marche du monde. En 1990, lorsque le président irakien d’alors, Saddam Hussein était sur le point d’envahir le Koweït, l’ambassadrice américaine avait déclaré que cela ne "concernait" pas les Etats-Unis, c’était selon elle une question bilatérale qui devait se régler entre les deux nations. Saddam Hussein a pris cette position pour un feu vert, et quelque temps plus tard il envahissait le Koweït. L’Irak fut finalement expulsé du Koweït par une coalition menée par les Etats-Unis, ce fut la première guerre du golfe en 1991. D’aucuns pensent que si les Américains avaient clairement sorti les griffes, les Irakiens n’auraient pas osé envahir le Koweit.
La puissance des Etats-Unis leur confère de facto le rôle de gendarme de la planète. C’est ainsi. Dans un monde où il n’y a pas de leader, le désordre s’installe. Or aujourd’hui, l’homme à la tête de ce pays n’est pas clairement disposé à assumer ce rôle, du moins les obligations qui vont avec. Donald Trump a toujours affirmé que tant qu’il sera à la maison blanche, "aucun soldat américain ne combattra à l’étranger". Il dit avoir été élu " pour arrêter les guerres, pas pour les commencer’’. Cela peut paraître noble comme conviction, mais prononcée par le président des Etats unis, une telle phrase ne manque pas de susciter des inquiétudes dans le monde, surtout dans les pays dont la sécurité dépend des Etats-Unis en vertu de certains accords.
Tout comme le dialogue, la force reste aussi une option pour résoudre les différends entre les nations. On ne peut pas à priori l’écarter. Lorsque le Koweït a été envahi en 1990 par l'Irak, le dialogue et les sanctions contre ce pays ont échoué. Restait la force. Les Etats-Unis furent obligés de frapper pour libérer le Koweït. Donald Trump peut-il faire preuve d’une telle détermination ? On peut en douter. Il a certes bombardé l’Iran, il a aussi effectué des frappes sur le Yémen, mais ce sont des actions ponctuelles, le service minimum. L'homme serait incapable de s’engager dans un conflit majeur à l’image de ses prédécesseurs républicains (Bush père et fils, Reagan, Eisenhower, Théodore Roosevelt, ……). On pourrait même dire qu’il n’a pas le mental "taillé" pour de telles entreprises.
Après avoir vanté ses « excellentes relations » avec le président russe durant quelque six mois, Trump a fini par admettre que ce dernier le " menait". Il a alors promis des "conséquences terribles" si la Russie ne cessait pas la guerre dans un délai de "60 jours". Il a ensuite ramené l’ultimatum à "10 jours", promettant des "sanctions dévastatrices" pour l’économie russe. Pourtant la Russie est déjà sous sanctions massives, ce qui ne l’empêche pas de continuer la guerre. Pour les experts, Il faut plutôt fournir des armes à l’Ukraine pour lui permettre de frapper Moscou, c’est seulement cela qui incitera Poutine à négocier. Mais Trump s’y refuse, disant vouloir éviter "l’escalade du conflit".
Finalement le sommet avec Poutine en Alaska le 15 Août dernier, qui a tenu le monde en haleine, n’a débouché sur aucun résultat concret. Tout le monde s’accorde à dire que Poutine a cerné la personnalité profonde de Donald Trump, notamment son aversion de l’usage de la force militaire, quoi qu’il veuille donner l’image d’un "dur". En fait le "dur" c’est Poutine et non Trump. Pendant la campagne présidentielle, il avait clamé haut et fort qu'il arrêterait cette guerre en "24 heures" s'il était élu. Poutine lui a fait comprendre que la chose n'était pas possible.
A un journaliste qui lui demandait s’il comptait engager l’armée américaine au cas où la Chine viendrait à envahir Taiwan, Donald Trump a éludé la question. Son prédécesseur Joe Biden avait fermement répondu qu’il défendrait l’île. Que ce soit en Asie ou en Europe, l’heure est aujourd’hui à l’inquiétude chez les alliés des Etats-Unis. Pour Trump qui envisage la réduction des effectifs américains à l’étranger, il est temps que tous ces pays assurent désormais leur sécurité.
Trump s’est mis dans la tête d’obtenir le prix Nobel de la paix. C’est légitime pour un dirigeant, et il semble sur la bonne voie, eu égard aux accords obtenus entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, entre l’Inde et le Pakistan, entre la RDC et le Rwanda, entre le Cambodge et la Thaïlande. Concernant la guerre de 12 jours entre l’Iran et Israël, s’il a bien bombardé l’Iran, les hostilités ont cessé sous la pression qu’il a exercée. Ainsi Trump se vante régulièrement d'avoir arrêté cinq guerres. Mais tous ces résultats seront-ils durables ? La rapidité des accords suggère que les questions de fond n’ont pas été traitées. En fait, ces conflits semblent avoir été gelés. Il n’est pas exclu qu’une fois Trump parti de la maison blanche, ces pays entrent de nouveau en belligérance.
Si son imprévisibilité le rend menaçant, c’est seulement une perception, car Donald Trump est loin d’être un "guerrier", militairement parlant. Pendant la guerre du Vietnam, il a réussi à échapper à la mobilisation, et il s'en est plusieurs fois félicité dans ses meetings, critiquant aux passages tous les héros de guerre et les vétérans de ce conflit. Aujourd’hui c’est juste un homme d’affaires qui a prospéré dans l'immobilier, la guerre n’est pas son "truc", il veut se tenir loin du fracas des armes. Il n'est pas sûr que ce soit l’attitude appropriée quand on dirige un pays comme les Etats-Unis.
Douglas Mountain
Le Cercle des Réflexions Libérales
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