Biden autorise l’Ukraine à utiliser des armes américaines pour frapper en Russie

L’administration du président Joe Biden a autorisé l’Ukraine à utiliser des armes de fabrication américaine pour frapper profondément en Russie, ont déclaré dimanche 17 novembre 2024 deux responsables américains et une source proche de la décision, dans un revirement significatif de la politique de Washington dans le conflit Ukraine-Russie.

L’Ukraine prévoit de mener ses premières attaques à longue portée dans les prochains jours, ont indiqué les sources, sans révéler de détails en raison de problèmes de sécurité opérationnelle.

Cette décision intervient deux mois avant l’entrée en fonction du président élu Donald Trump le 20 janvier et fait suite à des mois de demandes du président ukrainien Volodymyr Zelenskyy pour permettre à l’armée ukrainienne d’utiliser des armes américaines pour frapper des cibles militaires russes loin de sa frontière.

Ce changement intervient en grande partie en réponse au déploiement par la Russie de troupes terrestres nord-coréennes pour compléter ses propres forces, une évolution qui a suscité l’inquiétude à Washington et à Kiev, ont déclaré un responsable américain et une source proche du dossier.

La Maison Blanche et le Département d’Etat ont refusé de commenter l’information, selon Cnbc. Le ministère ukrainien des Affaires étrangères et le bureau du président n’ont pas immédiatement répondu aux demandes de commentaires.

La Russie a prévenu qu’elle considérerait toute décision visant à assouplir les limites imposées à l’utilisation des armes américaines par l’Ukraine comme une escalade majeure.

Les premières frappes en profondeur de l’Ukraine devraient être menées à l’aide de roquettes ATACMS, dont la portée peut atteindre 306 km, selon les sources.

Bien que certains responsables américains aient exprimé leur scepticisme quant au fait que l’autorisation de frappes à longue portée modifierait la trajectoire globale de la guerre, cette décision pourrait aider l’Ukraine à un moment où les forces russes progressent et éventuellement mettre Kiev dans une meilleure position de négociation lorsque et si des pourparlers de cessez-le-feu ont lieu.

On ne sait pas encore si Trump reviendra sur la décision de Biden une fois qu’il sera au pouvoir. Trump critique depuis longtemps l’ampleur de l’aide financière et militaire américaine à l’Ukraine et s’est engagé à mettre fin rapidement à la guerre, sans expliquer comment.

Un porte-parole de Trump n’a pas immédiatement répondu à une demande de commentaire. Mais l’un des plus proches conseillers de Trump en matière de politique étrangère, Richard Grenell, a critiqué la décision.

«Il va intensifier les guerres avant de quitter ses fonctions», a déclaré Grenell, dans un message publié sur X en réponse à la nouvelle.

Certains républicains du Congrès ont exhorté Biden à assouplir les règles sur la manière dont l’Ukraine peut utiliser les armes fournies par les États-Unis.

Depuis la victoire de Trump le 5 novembre, de hauts responsables de l’administration Biden ont déclaré à plusieurs reprises qu’ils utiliseraient le temps restant pour s’assurer que l’Ukraine puisse combattre efficacement l’année prochaine ou négocier la paix avec la Russie en «position de force».

«Bien trop tard »
Les États-Unis estiment que plus de 10 000 soldats nord-coréens ont été envoyés dans l’est de la Russie et que la plupart d’entre eux se sont déplacés vers la région de Koursk et ont commencé à s’engager dans des opérations de combat.

La Russie progresse à son rythme le plus rapide depuis 2022 malgré de lourdes pertes, et l’Ukraine a déclaré avoir affronté certains des soldats nord-coréens déployés à Koursk.

Mis à rude épreuve par le manque de personnel, les forces ukrainiennes ont perdu une partie du terrain conquis lors d’une incursion en août à Koursk, qui, selon Zelenskyy, pourrait servir de monnaie d’échange.

« La suppression des restrictions de ciblage permettra aux Ukrainiens d’arrêter de se battre avec une main liée dans le dos», a déclaré Alex Plitsas, chercheur principal non-résident à l’Atlantic Council.

« Cependant, comme pour tout le reste, je pense que l’histoire nous dira que la décision est arrivée bien trop tard. Tout comme pour les ATACMS, les HIMARS, les véhicules de combat Bradley, les chars Abrams et les F-16. Ils étaient tous nécessaires bien plus tôt », a-t-il ajouté.

Malgré les supplications de Zelensky, la Maison Blanche s’est montrée réticente à autoriser l’utilisation d’armes fournies par les États-Unis pour frapper des cibles situées au plus profond de la Russie, de peur que cela n’aggrave le conflit.

Les autres alliés de Kiev fournissent des armes, mais avec des restrictions sur la manière et le moment où elles peuvent être utilisées en Russie, par crainte que de telles frappes puissent déclencher des représailles qui entraîneraient les pays de l’OTAN dans la guerre ou provoqueraient un conflit nucléaire.

Le ministre polonais des Affaires étrangères, Radoslaw Sikorski, a également qualifié cette décision de réponse à l’implication de la Corée du Nord.

«Le président Biden a répondu à l’entrée des troupes nord-coréennes dans la guerre et à la frappe massive de missiles russes dans un langage que V. Poutine comprend – en supprimant les restrictions sur l’utilisation des missiles occidentaux par l’Ukraine», a déclaré Sikorski sur X.